Bordeaux : Un peu d'histoire

Avec l'Empire, la vigne apparait pour la première fois sur les flancs de Garonne; c'est pour la ville la promesse d'un commerce prospère et florissant dont le géographe grec Strabon se fait l'écho dans son oeuvre Géographica en définissant la cité comme une «place de commerce, un emporion». Burdigala connait alors une importante phase de romanisation avec la naissance du système routier et l'implantation de temples (piliers de Tutelles) et amphithéâtre (palais Gallien). Au VIe siècle, l'économie viticole est en plein essor et le vin connaît son premier grand succès outre-Manche. La cité est alors une capitale économique et intellectuelle connue de tout l'empire.

C'est la fille du dernier des ducs d'Aquitaine, la célèbre Eléonore (Aliénor d'Aquitaine), qui apporta les pays Girondins à la couronne de France, puis, après sa répudation par Louis VII, les donna à son nouvel époux, Henri Plantagenêt, futur roi d'Angleterre. Ce remariage est pour les capétiens une catastrophe politique: les domaines réunis d'Henri et d'Eléonore sont déjà aussi vaste que ceux du roi de France. Pour Bordeaux, la domination anglaise est synonyme de prospérité. La ville devient le "port du sud de l'Angleterre ainsi que sa terre à vigne". La croissance s'accompagne d'une intense période où la région se pare de cathédrales (Saint-André, Saint-Michel) et de superbes châteaux forts de campagne (Villandraut, Budos). Cette prospérité encourage le royaume de France à récupérer son héritage et la bataille de Castillon, le 17 juillet 1453, sonne le glas de Bordeaux et de toute l'Aquitaine. C'est la fin de la Guerre de Cent Ans.

La vigne a été introduite dans la région par les romains. Ce vin, que les Anglais appellent "claret" est très apprécié des Plantagenêt. Le raisin est alors chose sacrée : qui dérobe une grappe a l'oreille coupée. La qualité du claret est l'objet de tous les soins : six dégustateurs jurés vérifient les vins. Les marchands qui pratiquent le coupage sont sévèrement punis.

C'est Richelieu qui, le premier, a installé dans les provinces ces hauts représentants du pouvoir central et Colbert a mis l'organisation au point. Les intendants embellirent la ville en lui donnant l'allure d'une véritable capitale. Le secteur du vieux Bordeaux inclus entre le quartier des chartrons et le quartier St-Michel compte quelques 5000 immeubles d'une architecture 18^e siècle.

Le nouvel intendant Tourny, nommé en 1743, poursuit l'élan de rénovation et d'embellisement de son prédécesseur Boucher, en relevant le défi de faire de Bordeaux, encore vieille cité médiévale enfermée dans ses murailles, une ville moderne. En une dizaine d'années, son programme transforme pronfondément et durablement le visage de la ville en multipliant les places ( place Royale, place Dauphine, place des Capucins ), les portes ( portes Dijeaux, porte d'Aquitaine, porte de Bourgogne ) et les allées et promenades ( Jardin Royal, allées de Tourny ).

Le classicisme Bordelais se retrouve dans les monuments civils de la cité et surtout dans d'admirables ensembles architecturaux comme la place de la Bourse conçue par Gabriel pour le palais de la Bourse et l'hôtel des Fermes (Douanes); des monuments tels que l'Hôtel de la Marine, l'Hôtel du Duc de Richelieu, le Palais de Rohan ( hôtel de ville ), les hôtels particuliers des Chartrons, le portique de l'école d'équitation et le Grand-Théâtre, oeuvre maîtresse de Victor Louis, le plus beau théâtre de France. Dans un site urbain d'une incontestable grandeur, embelli par la main de l'homme, Bordeaux s'offre sur la boucle du fleuve ( que l'on nomme ici "la rivière" ), dont elle épouse la courbe en forme de croissant.

Pendant la révolution, les députés de Bordeaux, dont le plus célèbre est Vergniaud, créent le parti des Girondins qui aura la majorité à la Législative et au début de la Convention. Comme ils sont de tendance fédéraliste, les Montagnards les accusent de conspirer contre l'unité et l'indivisibilité de la République; vingt-deux d'entre eux sont mis en accusation, condamnés à mort et exécutés.

Pour rendre gloire aux girondins battus par les montagnards à la révolution, une fontaine fut édifiée à la fin du siècle dernier, entre 1894 et 1902 : le monument des Girondins sur l'esplanade des Quinconces.